Rencontres Musicales Archipels 2021 à Chateauneuf Sur Charente
Premier jour, le 18 Juin 2021
J’y étais pas mais je peux quand même en causer, j’avais mes espions.
Dans le jardin public, donc, en plein air, avec un beau temps, comme dans la toile « l’angélus » (de Milou (sans Tintin)) .
Une scène avec des musiciens, c’est le trio de Louis Sclavis, avec Dominique Pifarély et Vincent Courtois, mes espions m’ont dit que c’était super (sans plomb of corse) ce qui ne m’a pas surpris car je les ai en disque. Alors si vous voulez savoir de quoi il s’agit, achetez cette galette, c’est chez ECM, ça s’appelle Asian Fields Variations et ça coûte moins cher qu’une bouteille de mauvais Bordeaux.
Dans la soirée un duo, super itou comme Sclavis, mais moins connu de la fameuse ménagère de moins de cinquante ans. Ce duo Rhizottome, c’est Armelle Dousset à l’accordéon et Matthieu Metzger au sopranino, pour une musique flirtant avec un répertoire traditionnel, hérité des musiques du monde.
Moi qui n’y étais pas je vous le rappelle, je suis allé les voir sur le net, et je peux vous confirmer que c’est de la bonne musique, vivante et colorée, ils ont aussi un cd que vous pouvez écouter les yeux fermés mais n’oubliez pas d’ouvrir vos oreilles.
Bon je tire le rideau pour cette première journée.
Deuxième jour, le 19 Juin
Là je ne vais pas vous raconter des salades, j’y étais en chair (oui je sais, bien en chair) et en os.
Premier concert, vers 15 heures : Labulkrak, une bande d’une quinzaine de grands garçons (je crois, j’ai pas compté) dont une fille (bonjour la parité), jeunes et beaux, tous habillés en noir comme s’ils se préparaient à aller à l’enterrement de Bernard Tapie . Je vais vous dire un truc, des fanfares j’en ai entendu dans ma vie, et j’en voudrais une à mes obsèques, eh bien je peux vous affirmer que ces joyeux drilles ils ont une sacrée patate comme on dit à Roland Garros (comme feu Christian le batteur). Évidemment ça sonne fanfare, mais c’est loin d’être foutraque, c’est hyper composé dans l’ensemble, avec des envolées Free (eh ! On est quand même pas dans un festival de bourrée auvergnate), ça nous a rappelé par moment les meilleures périodes de la grande Carla, et ça c’est une référence ! Bon, encore une fois pour vous les absents, ils ont au moins sorti quatre disques, que j’ai tous achetés, et je me suis fait engueuler par ma tirelire qui est un traditionnel petit cochon rose très sympa quand-même (que je ne balancerai jamais, même si j’ai une Fémen dans mon dos).
Dans un petit kiosque à musique en pierre, mignon comme tout, suite des festivités, avec Christiane Bopp au trombone solo (qui porte bien mal son nom pour quelqu’un qui ne fait que de la musique dite improvisée, elle a dû l’entendre mille fois, celle-là !).
Christiane c’est une ciseleuse, une sculptrice de son, d’une grande délicatesse, elle s’accompagne parfois d’instruments de percussion de sa fabrication, et c’est beau, je n’ai rien à ajouter. Si, peut-être un truc, j’ai rarement entendu un public aussi silencieux, seule une mouche aurait pu rompre cette belle harmonie, et je suis sûr que notre musicienne l’aurait intégrée dans sa performance.
Une heure plus loin, même endroit, Michele Rabbia, percussionniste de son état, encore un orfèvre, architecte sonore, pas spécialisé dans les grands buildings mais plutôt dans les petites folies. On pourrait, le concernant, utiliser les mêmes qualificatifs que pour C. Bopp, c’est du léché, c’est aussi en solo, et ça nous change des Max Roach ou des Art Blakey (non, je déconne). Là aussi la mouche est resté tapie (encore lui). Bopp/ Rabbia, ils ont fini ensemble, pour un trop court instant . Un des grands moments du festival que nous ont offert ces deux splendides artistes .
La petite cerise sur le gâteau breton, c’est en fin de soirée avec la formation du Jacky Molard Quartet, avec Hélène Labarrière, ça bretonnise bien sûr (mais pas que) avec une Hélène époustouflante de justesse et d’énergie et toujours respectueuse envers sa Grand-Mère qu’elle traite avec beaucoup de délicatesse pour notre plus grand plaisir. Dominique Pifarély est venu se joindre au groupe, pour un final de ouf (restons jeunes). Là aussi y’a plein de galettes (bretonnes, ah! ah!) en stock chez les bons disquaires.
Bon c’est terminé, j’ai envie d’intituler cet événement «Le Festival Entre Les Gouttes» (même si j’ai dit au début qu’il faisait beau, ce qui n’est pas tout à fait faux car la pluie c’est du beau temps, surtout si elle fait des claquettes) finalement il n’a plu que trois gouttelettes, donc pas suffisamment pour faire sortir les cagouilles, dommage pour elles car elles ont raté de beaux concerts.
Dans les «coulisses» on a pu croiser quelques acteurs essentiels du monde du jazz, les gens des Allumés du Jazz, le producteur et programmateur Jean Rochard (Nato) le producteur Stéphane Berland (Ayler Records), le grand Kent Carter, Bruno Tocanne batteur et programmateur du festival « Les Trois Palis » qui aura lieu mi-septembre, et où vous êtes obligés d’aller car c’est aussi en Charente avec une programmation aux petits oignons (comme disait Sydney) avec des concerts dans une belle église du XIIéme siècle. Même si vous ne croyez en rien, on vous laissera entrer du moment que votre foi concerne la musique, et la bonne (pas celle du curé). Des performances musicales aussi en bord de Charente, la plus belle rivière de mon Royaume comme a dit François (pas Tonton, l’autre avant lui, donc Premier, mais pas le Pape non plus).
Vu déambuler, aussi dans ce festival, François Corneloup légende du baryton, qui ne jouait pas ici mais que l’on pourra retrouver à Trois Palis (venez-y non d’une pipe en bois!). Tiens, aperçu aussi notre baryton (basse, parfois) local, Jean-Luc Petit, à qui ses enfants n’ont jamais demandé de gonfler leur ballon de peur de le voir éclater, tellement cet individu à une cage thoracique impressionnante ! Ça se traduit en concert et sur ses nombreux disques par un bouillonnement foisonnant et rarement interrompu avec bien sûr un son énooorme (Petit le coffre à jouer ). Autre rencontre, Philippe Levreaud, grand connaisseur de Jazz, qui a dû tomber dans La Marmite Infernale tout petit ( à Lyon?) ). En tous cas ce monsieur organise régulièrement dans sa campagne charentaise, chez l’habitant, donc chez lui à Bignac, des concerts de musiques impro de grande qualité.
Cette manifestation a été mise en images par un grand pro de la photo, Jean-Yves Molinari habitué à parcourir de sa silhouette longiligne, les festivals consacrés aux Musiques improvisées.
Ce photographe présente la particularité de pouvoir rester immobile de longues minutes avant d’appuyer sur le déclencheur de son appareil, c’est un patient, un pugnace, et le résultat est là.
Roger Brux Vanderbeken (texte)
Jean-Yves Molinari (photos)