Au fil des enregistrements se bonifie et se densifie l’art serein de la saxophoniste Silke Eberhard. Et, bientôt, l’auditeur ne pourra plus agiter les influences d’Ornette, Dolphy et autre Oliver Lake tant Silke fait œuvre, ici, d’une personnalité bien affirmée.
Formule parfois casse-gueule le trio saxophone-contrebasse-batterie semble fait pour elle : petites mélodies exclues du centre pour s’en aller rejoindre de juteuses périphéries, flux endurcis à toutes les géométries possibles, harmoniques toutes singulières, la dame étonnera ceux qui ne la connaissaient pas encore et conforteront ceux qui avaient misé sur elle. Le contrebassiste Jan Roder et le batteur Kay Lübke font plus que d’entourer la saxophoniste et distribuent, ici, un groove bouillonnant et pourvu de débordements soutenus.
Ces trois-là savent donc que les envolées resteront belles tant qu’elles résulteront spontanées et dépourvues de formules tape à l’oreille. Nulle provocation, nulle révolution revendiquée mais une musique sensible, totalement partagée et solidement édifiée.
Luc BOUQUET