“Let the City Sleep”
THE REMOTE VIEWERS
RV17
Pour qui ne connaîtrait pas encore les Remote Viewers, OVNI britannique, nous devons distinguer deux périodes. La première débute avec Low Shopes in Dark Heat (1998) et se termine avec Sudden Rooms in Different Buildings (2003). Elle s’articule autour d’un trio de saxophonistes (David & Louis Petts, Adrian Northover). S’y élabore un concept de science-fiction mâtiné de roman noir que complètent le chant glacial et envoûtant de Louise Petts ainsi qu’une myriade de synthétiseurs et theremins affolés et de reprises inattendues en un tel contexte (Sun Ra, Madonna, Bowie, Portishead, Satie).
A partir de Control Room (2007) soit après le départ de la chanteuse (qu’est-elle devenue ?), la musique tend vers une improvisation plus soutenue et plus européenne (la venue du contrebassiste John Edwards y est pour beaucoup) mais où subsistent toujours roman noir et accords ô combien discordants des saxophonistes. Il n’est pas rare d’y retrouver les saxophonistes Caroline Kraabel et Sue Lynch.
Let the City Sleep, covid oblige, n’a pas été enregistré dans les conditions habituelles. Aspirateurs, réfrigérateurs et autres bruits ménagers, klaxons, samples de diverses sources accaparent un espace entrecoupé par les solos des cinq musiciens. Celui de Sue Lynch résonne d’harmoniques étalonnées entre le très grave et le très aigu. Celui de Caroline Kraabel, enregistré sous un pont de voie ferrée, joue de la résonance du lieu et de courtes mais prégnantes trouées. John Edwards aime à inviter les périphéries de son instrument tout en activant archet succube et ustensiles divers accrochés aux cordes de sa contrebasse. Le solo de David Petts, enfin, le plus « civilisé » du lot, tout en empruntant harmoniques, convulsions et longs phrasés, évoque Evan Parker dans son approche du souffle continu. A l’heure où j’écris ces lignes, un coffret de trois CD est déjà annoncé. Promis, on en reparle.
Luc BOUQUET
